29 Une réponse dans un livre
Alain Gérard, a publié en 1995 chez Albin Michel un livre intitulé, Madame, c’est à vous que j’écris, adressée à Ernaux.
Un homme, découvrant par hasard le livre d’une femme qu’il a aimée [le livre Passion simple d’Annie Ernaux], s’y retrouve trahi : la liaison qu’il revit, au fil des pages, n’a rien de commun avec celle qu’il est certain d’avoir vécue. Quelques nuits plus tard, il décide de répondre. De dire le désir, mais aussi l’amour qui l’a uni à cette femme, son attente à lui, son extase, sa passion tour à tour triomphante, angoissée ou douloureuse.
Et l’auteur écrit :
Nous nous étions promis de ne jamais rien livrer de notre secret. Puisque, usant de votre qualité d’écrivain, abusant de ma confiance, vous avez trahi ce serment, livré au regard du monde la copie édulcorée d’une rencontre qui brûla dix-huit mois de ma vie, et m’obligea ensuite à quitter Paris, j’ai le droit de vous répondre.
Et, l’opposition avec le style d’Ernaux ne peut être plus vif. Gérard écrit :
Deux ans, seulement, déjà. J’allais en vous comme en une campagne, onde, montagne, océan, ombre, verger, monde, nuit, soleil levant, et vous n’en dites mot, comme si de la vie, seule l’attente importait. De ces deux années de bonheur incandescent, de vertige partagé, rien.
Tout n’est là que métaphores. Au fond, ce qui paraît avoir révolté ce lecteur, c’est surtout l’absence de métaphores dans le récit d’Ernaux. C’est donc précisément ce qui a été « admiré » par le jury Nobel, soit son style dépouillé et « clinique ».
Mais revenons à Philippe Vilain.