8 Les rapports d’Ernaux avec l’autofiction
Dans un entretien à L’express, Annie Ernaux dira :
Je n’ai rien à voir avec l’autofiction. Je voudrais le dire, quand même ! Dans l’autofiction, il y a beaucoup de fiction, justement. Et justement, ce n’est pas mon objet. Ça ne m’intéresse pas ! La littérature est intéressante dans ce qu’elle dit du monde. Ni le mot « auto » ni le mot « fiction » ne m’intéressent.
Le mot « auto », au sens de « parler de soi », le mot « fiction » au sens de « dire ce qui n’est pas » ne qualifient effectivement pas le travail d’Ernaux. On va voir pourquoi.
Ainsi, dans le colloque organisé à Nanterre, en 1992, sur l’autofiction, Ernaux déclare :
Je récuse l’appartenance à un genre précis, roman et même autobiographie. Autofiction ne me convient pas non plus. Le je que j’utilise me semble une forme impersonnelle, à peine sexuée, quelquefois même plus une parole de « l’autre » qu’une parole de « moi » : une forme transpersonnelle, en somme. Il ne constitue pas un moyen de me construire une identité à travers un texte, de m’autofictionner, mais de saisir, dans mon expérience, les signes d’une réalité familiale, sociale ou passionnelle. Je crois que les deux démarches, même, sont diamétralement opposées.