Foucault, le récit de soi
Or c’est précisément ce type de récit que Foucault analyse dans les cours qu’il donne au Collège de France pendant les dernières années de sa vie. Il y montre que les stoïciens, dans l’antiquité déjà, avaient repéré la valeur exploratrice et inventive du récit de soi.
Foucault range ces récits, que les stoïciens appellent hupomnémata, dans un ensemble plus vaste qu’il nomme les « techniques de soi ».
L’approche de Ricœur et celle de Foucault, bien qu’elles visent l’une et l’autre le récit, ont été menées indépendamment et même dans une ignorance mutuelle entretenue par une rivalité d’école — qui n’était pas sans conséquence institutionnelle — entre la phénoménologie qu’incarnait Ricœur et le structuralisme qu’incarnait (bien qu’il s’en soit souvent défendu) Michel Foucault.
En les rapprochant, cependant, on obtient une vue plus aiguë sur la nature de ce phénomène de remaniement inventif du passé par le récit. Mais, avant d’y venir, je voudrais dire quelques mots de la principale interprétation qui a été donnée de ce phénomène.