39 Qui dit ça ?

  • Intervention de Camille Laurens au colloque de Cerisy consacré à l’autofiction (2007) :

Qui dit ça ? D’où ça sort ? Car la langue provient d’un corps, d’un seul corps, elle est unique comme une empreinte digitale – elle est une sécrétion qui permet de dire un secret. De le dire en partie seulement, car tout ne peut être dit, il y a de l’impossible. Ce secret, celui d’une expérience humaine singulière, c’est ce à quoi s’attache l’autofiction : quelque chose de soi dont on sait qu’en l’exprimant on le rate, mais vers la formulation de quoi on tend, et qui est le réel.

Et elle ajout que c’est là, à son avis, ce qui crée la « force » de l’autofiction :

La force principale de l’autofiction est là : c’est réfléchir à l’individu, y compris à l’individu qui écrit. C’est la compréhension de soi à l’ère du soupçon. Je reviens à Nathalie Sarraute : les états complexes que le romancier cherche à découvrir sont « comme ces phénomènes de la physique moderne, si délicats et infimes qu’un rayon de lumière ne peut les éclairer sans qu’il les trouble et les déforme ».