41 Relier deux opérations
Le point important ici est que Benveniste relie deux opérations conceptuelles concomitantes. D’abord : passer de l’analyse du langage à l’analyse du discours. L’exercice de la langue, ce n’est pas le langage, c’est le discours (voir, à ce sujet, le texte de Jocelyn Benoist en ligne qui fait une archéologie de la notion de discours chez Foucault en soulignant sa dette à Benveniste et à Wittgenstein). Ensuite, passer du sujet métaphysique (l’ego cartésien ou phénoménologique) au sujet tel qu’il s’inscrit dans ces discours, dans tout ce qui le situe.
Le terme (et le concept) de discours vient donc compléter un manque entre l’énonciateur du discours et le langage pris dans sa structure commune et générale. Entre le langage et le locuteur, il y a le discours.
Quand je dis quelque chose, quand je parle, je ne manie pas le langage (comme je le ferai d’un instrument), mais je dis quelque chose que j’éprouve le besoin ou l’envie de dire. Et, ce faisant, je forme un discours si simple et élémentaire que celui-ci puisse être.
Le langage est ainsi organisé qu’il permet à chaque locuteur de s’approprier la langue entière en se désignant comme je.