19 En 1947, Sartre publie Qu’est-ce que la littérature ?
Il y définit ce qu’il nommera l’écrivain engagé. Et, comme je l’ai indiqué, il a tenté d’en donner l’exemple dans Le sursis, qui se déroule du 23 au 30 septembre 1938.
Il raconte les entrevues de Munich qui donneront lieu aux accords du même nom :
L’avion s’était posé. Daladier sortit péniblement de la carlingue et mit le pied sur l’échelle ; il était blême. Il y eut une clameur énorme et les gens se mirent à courir, crevant le cordon de police, emportant les barrières ; Milan but et dit en riant : « À la France ! À l’Angleterre ! À nos glorieux alliés ! » Puis il jeta de toutes ses forces le verre contre le mur ; ils criaient « Vive la France ! Vive l’Angleterre ! Vive la paix ! » ils portaient des drapeaux et des bouquets. Daladier s’était arrêté sur le premier échelon ; il les regardait avec stupeur. Il se tourna vers Léger et dit entre ses dents : – Les cons !
Et tout ceci, nous l’avons vu la dernière fois, se présente comme un style qui est en opposition à ce qu’écrirait l’écrivain de l’exis (on se souvient que Beauvoir qualifie Sarraute d’« écrivain de l’exis », reprenant cette catégorie à Sartre). C’est-à-dire à l’écrivain qui n’a de préoccupation que pour lui-même et pour son art, l’écrivain de l’art pour l’art.
L’écrivain doit être tendu vers une praxis, vers un effet qu’il cherche à produire dans le monde, selon Sartre.